jeudi 10 novembre 2011

SIMPLE RETOUR


Les BRIC’S, vous connaissez ?

C’est par cet acronyme que l’on désigne les principaux pays émergents : Brésil, Russie, Inde, Chine et South Africa (Afrique du Sud).
On parle souvent, à l’heure actuelle, de globalisation, de mondialisation et même d’asiatisation. Pourquoi ? Il y a quelques décennies, dans un film intitulé « Les dieux sont tombés sur la tête », un indigène en pleine brousse africaine, voyait tomber à ses pieds une bouteille de ‘coca-cola’, en même temps qu’un avion s’éloignait dans le ciel vers l’horizon. Et tout le film montre notre héros à essayer de comprendre le signe que les dieux du ciel lui avaient envoyé. Tout en restant dans l’ignorance que des bouteilles comme celle-là, envahissaient le monde entier, par milliards, comme d’autres Pepsy, Mac-Do, Microsoft, Whisky, séries américaines, et tout cela en langue anglaise.
Depuis la ‘Perestroïka’ de Mikhaïl Gorbatchev et du démantèlement du bloc soviétique, le monde appartenait à l’Amérique triomphante. Mais depuis une dizaine d’années, de nouvelles entités : les BRICS, émergent à vue d’œil, du fin fond de l’âge de la pierre, selon ce que veulent nous faire croire les mauvaises langues occidentales, mais détrompons-nous, ne nous y laissons pas piéger.
Prenons par exemple l’Inde et la Chine : à toutes les deux, leur population équivaut à 240 fois celle du Portugal, et elles ont dominé le monde depuis bien avant l’avènement chrétien. 500 ans avant notre ère, le Bouddha en Inde ainsi que Lao-Tseu et Confucius en Chine, ont crée le processus identitaire de deux grandes civilisations et de deux grands ateliers du monde. Il y a 2000 ans, la Chine maîtrisait déjà la fabrication et la cuisson de la porcelaine, alors que 15 siècles plus tard, les européens mangeaient encore dans des écuelles en terre cuite. Idem pour la métallurgie et notamment l’industrie du fer (500 ans av. JC.) ; les explosifs, le papier, les techniques agricoles de masse, la joaillerie, les arts et l’artisanat en général, mais surtout l’exploitation de la soie. Dans tout cela, comptez de 500 à 1000 ans d’avance par rapport à l’Europe. On peut comprendre mieux en sachant que la Mésopotamie (une grande partie de l’Iraq actuel) a été, 5000 ans avant JC. Le berceau de toutes les civilisations, avec son organisation sociale en villages d’agriculteurs, des techniques agricoles par systèmes d’irrigation, les arts et surtout l’invention et le développement de l’écriture, qui se sont propagées vers l’Egypte, la vallée de l’Indus et la Chine.
L’Inde était, à l’époque de la Renaissance en Europe, le principal moteur de l’économie mondial, constituée, en plus de l’Inde actuel, du Pakistan d’un côté, du Bangladesh de l’autre, ainsi que d’une partie de l’Afghanistan, et forte de 150 millions d’habitants. Ses techniques dans le travail de la soie, de l’orfèvrerie, du sertissage, des émaux, du cuir pour la cavalerie, étaient à l’apogée. Ses fondeurs en bronze, cuivre et fer étaient réputés et respectés dans toute l’Asie. Quand Vasco da Gama, et plus tard Pedro Alvares Cabral, suivis d’autres ‘grands’ européens arrivèrent en Inde, ils se sont sentit comme des enfants éblouis dans une boutique de bonbons, tellement s’étalait la finesse, la beauté et la richesse des choses et des marchandises. Eux qui y sont arrivés avec des peaux et autres babioles pour faire du troc, s’entendaient répondre à peu près ceci : « Qu’est-ce que vous voulez qu’on en foute de ça !?... Rapportez-nous plutôt de l’or, de l’argent et des pierres précieuses et nous vous en fabriquerons de belles choses ». Et c’est ce que les européens ont fait : un tiers de ces métaux nobles et pierreries volées aux civilisations d’Amérique du Sud, ou arrachées par l’esclavage dans les mines du haut Sénégal, en Côte d’Or, au Zimbabwe, c'est-à-dire par centaines de tonnes, sont reparties en Inde et en Chine pour payer des épices exotiques, et habiller ces messires et nobles dames des cours européennes, bien pauvres et démodés par rapport à l’Asie.
Hélas !... Au début du 18ème siècle, l’arrivée en force des ‘compagnies’ européennes, surtout anglaises, bien décidées à mettre la patte sur ces richesses et savoir faire, ont fait basculer cet ensemble millénaire, dans la plantation forcée d’opium, de coton et dans la ruine, jusqu’à ce que le grand Gandhi arrive. C’est encore à partir de ce siècle, soit disant des ‘Lumières’ et du début de l’industrialisation, l’Europe armée et instruite de tous les savoirs, grappillés aux quatre coins du monde, depuis la Renaissance, que ce soit an Asie pour l’évolution technologique ; en Afrique pour la richesse du sol, du sous-sol et de ses esclaves, ainsi qu’en Amérique du Sud pour ses trésors et ses mines, repartit donc, à la conquête de la planète. Mais depuis deux décennies, notre monde a complètement chamboulé de nouveau, dans un espace temps très court : La fin de l’’apartheid’ en Afrique du Sud ; les réformes de Deng Xiaoping en Chine et de Manmohan Singh en Inde ; Poutine en Russie, avec ses atouts énergétiques (et ses mafias) ; le dynamisme de Lula et de l’agro-alimentaire brésilien ; d’un autre côté, les leçons d’humilité ?... de l’Amérique au Vietnam, en Iraq, en Afghanistan, ont remis en mouvement une réinitialisation de la place de l’Asie dans le monde. Aujourd’hui ce sont eux qui ont l’argent et le pouvoir de venir faire des emplettes en Europe. Selon une étude du Pew Research Center en 2011 : 87% des chinois ont confiance dans l’avenir, comme 50% des brésiliens, contre seulement 30% des américains et… 26% des français, (sans commentaire). Il nous reste, bien entendu, certaines valeurs dont nous pouvons, pour un certain temps encore, en retirer quelque fierté : la pratique de la démocratie,
et la mise à disposition de chacun, des savoirs nécessaires pour faire évoluer son projet d’expression et réalisation personnelle. Mais l’Asie aussi, nous a transmit, et surtout aujourd’hui, des formes de spiritualité haut de gamme, basées sur le détachement du matérialisme maladif ; la recherche de l’harmonie de nos propres énergies ; l’appropriation personnelle d’une transcendance non dogmatique, etc. Il y a une légende en Inde qui raconte qu’Alexandre le Grand, y est allé à la recherche d’un sage très connu. L’ayant trouvé dans un recoin de montagne, il lui dit : « Mon ami, je suis un grand roi, que puis-je faire pour toi ? » et le vieux sage de lui répondre : « Tu me caches la lumière du Soleil, écarte-toi un peu, c’est tout ce que je te demande. » C’est un peu cela la spiritualité en Inde.
Aujourd’hui, heureusement, de plus en plus d’historiens se soucient d’éclairer d’un regard nouveau, l’Histoire humaine, replacée dans ses contextes géographiques et temporels et relue sur place, au lieu de celle, apprise dans notre enfance, qui nous expliquait que l’Europe était le centre du monde, et qu’autour ne régnait que l’obscurité, l’ignorance et la misère. Cela ne veut
nullement dire que tout était, ou est parfait, dans les autres continents, mais, qui peut admettre actuellement, que le notre est ou a été un phare d’exemplarité ? En tout cas, il n’est jamais trop tard, pour tous ceux qui veulent garder les yeux et l’esprit ouverts, de s’habituer à une relecture plus contemporaine de l’Histoire des peuples, et de constater par là même, que nous, européens, avons bien plus reçu que donné.
Par Henri de Carvalho, 6/11/2011

Sources : Réseau Asie & Pacific